"Affaire Carlton" : 10 ans après

 

Tout commence avec la mise sur écoute d’employés du Carlton suspectés d'organiser des soirées avec des prostituées. Ces écoutes, initiées en février 2011, révèlent l'existence d'un réseau bien organisé, avec des ramifications en Belgique. Quelques semaines plus tard, le nom de DSK surgit dans le dossier. Des témoignages indiquent qu’il aurait participé à ces soirées. Son implication marque un tournant décisif dans l'affaire, lui conférant une dimension politique.

Après plusieurs mois d’investigations, Dominique Strauss-Kahn est mis en examen en mars 2012. Il est accusé de proxénétisme aggravé, ce qui alourdit encore l'affaire. Aux côtés de DSK, 13 autres prévenus sont jugés, incluant des hommes d’affaires et des notables locaux.

Le 2 février 2015, le procès du Carlton s’ouvre au tribunal de Lille. L'affaire attire une couverture médiatique exceptionnelle. Plus de 200 journalistes du monde entier sont accrédités pour suivre ce procès hors norme, qui durera deux semaines.

En juin 2015, le tribunal prononce un verdict inattendu : 13 des 14 prévenus sont relaxés, dont DSK. Le seul condamné, René Cochfer, employé du Carlton, écope d'une peine pour proxénétisme en réunion, sans circonstances aggravantes.

Ce verdict suscite de nombreuses critiques. L'affaire met en lumière les difficultés de la justice française à prouver des faits de proxénétisme. Les témoignages des femmes impliquées sont souvent minimisés, anticipant les débats qui émergeront avec le mouvement #MeToo.

L'enquête révèle un système bien structuré, dépassant le cadre du Carlton. Des connexions existent entre des proxénètes basés en Belgique et des personnalités influentes. Certaines femmes décrivent un univers sordide, parlant de "boucherie" et d’"abattage".

Une rumeur persistante évoque un complot visant à discréditer DSK, favori de la gauche pour l’élection présidentielle de 2012. Des écoutes téléphoniques de 2010, impliquant un ancien responsable du renseignement français, alimentent cette hypothèse.

L’affaire met aussi en évidence la manière dont la justice traite les femmes prostituées. Leurs témoignages, souvent éclipsés par ceux des prévenus, illustrent un déséquilibre dans les procès de proxénétisme.

L'affaire du Carlton reste un exemple marquant des limites du droit pénal face au proxénétisme. Elle a révélé les réalités sombres du monde de la prostitution et soulevé des questions sur le pouvoir médiatique et politique dans les grandes affaires judiciaires françaises.